LES METAMORPHOSES DE CLAUDE FROLLO
J'ai toujours été surprise, à la lecture de Notre-Dame de Paris, par la liberté avec laquelle Hugo a peint le personnage de Claude Frollo: non seulement parce qu'il est prêtre, mais aussi parce que la description de son désir et de sa frustration me paraît d'une audace extrême. Plusieurs critiques ont accusé l'auteur d'irreligion, de matérialisme, et ont été gênés par le manque de "lumière venue d'en haut", ou comme Montalembert par les "peintures lascives"; le roman a d'ailleurs été mis à l'index par l'Eglise en 1834. Mais somme toute, le livre a été un succès et le personnage de Frollo, ecclésiastique fou d'amour et de désir, ne semble pas avoir provoqué de trop violentes réactions.
Pourtant, quand on s'intéresse d'un peu près aux adaptations du roman dans les livrets d'opéra, on s'aperçoit une fois de plus que ce qui était plus ou moins accepté dans un livre, malgré des réserves, ne l'est plus du tout sur une scène (ou sur un écran, mais ce n'est pas ici mon propos). Claude Frollo est soumis à de nombreuses métamorphoses et surtout, dans la plupart des cas, s'il demeure troublé par la belle Esmeralda, il n'est plus prêtre, ce qui rend son désir moins transgressif, et permet de s'arranger avec la censure.
J'analyserai les représentations du personnage à partir de quatre exemples qui m'ont paru révélateurs et qui permettront d'aborder diverses époques et divers pays: la France de 1836, avec La Esmeralda de Louise Bertin, l'Espagne de 1875 avec le Quasimodo de Felipe Pedrell, l'Allemagne de 1913 avec Notre-Dame de Franz Schmidt, la France de 1998 avec Notre-Dame de Paris de Cocciante. Même si cette dernière oeuvre tient plutôt, par sa musique, de la comédie musicale, elle a été qualifiée d'opéra par son compositeur -en partie à cause de l'absence de dialogues parlés.
Hugo, à la demande de Louise Bertin, a travaillé au livret de Notre-Dame de Paris de l'automne de 1831 au début de 1836 . La copie destinée à la censure est enregistrée le 29 janvier 1836. Celle-ci exige que le titre soit changé et le mot "prêtre" remplacé partout où il se trouve. Ce que Hugo avait pu écrire dans son roman, il ne peut donc plus le faire admettre sur la scène de l'opéra. Pourtant, comme l'explique Arnaud Laster, qui a étudié en détail l'histoire de l'oeuvre, on ne s'y trompe guère au cours des
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